SystemX lance le projet Impact Environnemental du Numérique (IEN) pour outiller l’évaluation de la performance environnementale du numérique
mai 2024 par Marc Jacob
SystemX, l’Institut de recherche technologique (IRT) dédié à l’ingénierie numérique des systèmes du futur, annonce le lancement du projet Impact Environnemental du Numérique (IEN) visant à proposer une approche systémique pour évaluer les impacts directs et indirects des systèmes numériques (serveurs, infrastructures d’hébergement, logiciels, services numériques, etc.) sur l’environnement. Cette évaluation permettra aux organisations publiques et privées d’orienter les décisions d’investissement ou de recommander des usages plus adaptés afin de s’inscrire dans une démarche de sobriété numérique. Ce projet réunit Airbus Protect, Teclib’, Total Energies et CentraleSupélec pour une durée de 36 mois.
« L’empreinte carbone du numérique croît à mesure que s’opère la transition numérique de nos économies et de nos sociétés. On estime que le numérique est responsable de 2,5%* du total de l’empreinte carbone en France, un chiffre qui pourrait s’accroître considérablement pour atteindre quasiment 7%** dans les années à venir si rien n’est fait pour réduire son impact. Savoir monitorer son bilan Carbone devient un dû qui s’inscrit dans les directives UE, dans un objectif de neutralité carbone dès 2050. Or le coût environnemental de cette empreinte carbone du numérique reste encore largement méconnu. En particulier, sa méthodologie de calcul est insuffisamment documentée, ce qui représente un obstacle à la prise en compte de son impact et à la mise en œuvre de mesures de réduction. C’est l’objectif du projet IEN : mesurer les impacts réels – directs et indirects - du numérique sur l’environnement et agir, en faisant intervenir des indicateurs vérifiables, éditables et non opposables ainsi que des méthodologies faisant consensus », explique Gwenaëlle Berthier, cheffe de projet IEN, SystemX.
Une méthodologie de référence pour mesurer le coût environnemental des services numériques
A ce jour, plusieurs méthodologies d’évaluation existent mais elles sont non standardisées et silotées. La fiabilité des données recueillies est relative ; par exemple, les constructeurs de machines ne donnent pas précisément les bilans des systèmes en exécution ; cela reste également très opaque concernant les applicatifs déployés sur le cloud. Pour répondre à cet enjeu, le projet IEN va mettre au point des indicateurs et des méthodes de calcul transparents et homogènes, basés sur l’analyse de leur cycle de vie, pour quantifier de manière concrète les gains et coûts environnementaux induits en prenant en compte toutes leurs composantes (data center, réseau, terminaux, etc.). In fine, l’ambition affichée est de proposer un référentiel commun et une méthodologie outillée généralisable aux industriels, collectivités, fournisseurs, etc. pour leur permettre de faire des choix technologiques éclairés.
Pour y parvenir, les partenaires œuvreront en particulier :
– à la définition de règles de comptabilisation des impacts environnementaux des composants physiques sur toutes les phases du cycle de vie des systèmes numériques
– à la mise au point d’un outil d’aide à la décision, selon des critères environnementaux ou économiques, sur les choix technologiques, les modes de traitement de données et équipements utilisés à privilégier.
– au partage d’un guide de diagnostic systémique de l’impact environnemental à la communauté scientifique, voire d’une formation de sensibilisation à l’impact environnemental du numérique en accord avec les références institutionnels (Ademe, Arcep, etc.)
Les principaux verrous technologiques du projet concernent :
– la prise en compte de la complexité et de l’évolution technologique des systèmes
– les effets induits (incidences sur l’ensemble du cycle de vie d’une solution, décompte des externalités positives et négatives, quantification des impacts environnementaux indirects ou des effets rebonds, etc.),
– les difficultés liées à l’accès à des données fiables et harmonisées de la part des fournisseurs de services numériques,
– l’ajustement de l’outil d’aide à la décision pour faire une synthèse intelligible des résultats obtenus et expliquer à l’utilisateur les recommandations de l’algorithme.
La méthodologie de référence, les indicateurs et l’outil d’aide à la décision seront évalués sur trois cas d’usage apportés par les partenaires industriels du projet :
– L’exploitation et l’évolution d’un parc informatique diversifié multi-applications (équipements, applications et réseaux)
– L’adaptation et la configuration de l’architecture cybersécurité à déployer selon l’impact environnemental souhaité
– La mesure du bilan carbone d’applications d’IA (génératifs, modèles et données, HPC)
Cette méthodologie d’évaluation de l’empreinte environnementale a vocation à devenir généralisable à l’ensemble des systèmes complexes et vise l’appropriation de la réglementation et la maitrise des normalisations et standards existants, voir l’enrichissement des normes existantes.
Ces travaux s’inscrivent dans la thématique « Economie circulaire et transition écologique » de l’IRT SystemX visant à favoriser l’adoption de l’économie circulaire fondée sur une approche systématique globale.
Pour mener à bien le projet IEN, l’IRT SystemX pourra s’appuyer sur les travaux :
– autour des jumeaux numériques des territoires réalisés dans le cadre de son projet PSE (Paris Saclay Energies), et s’intéressant en particulier au cycle de vie des réseaux de chaleur déployés sur les territoires.
– de l’alliance CircularIT co-fondée avec CentraleSupélec et visant à animer l’écosystème des partenaires industriels autour de l’adoption et de la mise en œuvre de pratiques d’éco-conception des systèmes complexes.
*Etude ADEME- Arcep, 2022
**Rapport de la mission d’information sur l’empreinte environnementale du numérique du Sénat, 2020