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Renseignement : la course folle à la surveillance internationale de masse

septembre 2015 par La Quadrature du Net

L’examen de la proposition de loi relative aux mesures de
surveillance des communications électroniques internationales débutera à bas bruit le 1eroctobre
2015. On lui prédit déjà un avenir radieux, fait d’examens éclair et débats expédiés. Après la
censure du Conseil constitutionnel, qui avait amputé le système généralisé de renseignement de
sa branche internationale, ce texte prétend combler le vide et introduire un « progrès décisif »
 : l’encadrement des activités du renseignement extérieur.

Communiqué commun de l’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN) [1]

En fait d’encadrement, le texte construit minutieusement la toute-puissance de l’exécutif dans
la surveillance hors des frontières nationales. L’espionnage international à grande échelle y
est pensé comme une nécessité incontestable et qu’il est donc vain de contrôler : à peine les
rédacteurs se sont-ils astreints, sous la timide incitation du Conseil constitutionnel, à
enjoliver le texte de quelques limites, aussi lointaines que peu contraignantes.

Excroissance survitaminée de la loi du 24 juillet 2015, la proposition de loi confie au Premier
ministre le pouvoir d’autoriser la surveillance des communications émises ou reçues à
l’étranger. Les fondations de l’interventionnisme massif ont été posées par le nouvel article
811-3 du code de la sécurité intérieur 2, mêlant prévention de la criminalité organisée, du
terrorisme, défense et promotion des intérêts économiques, soutien de la politique étrangère,
surveillance des mouvements contestataires, comme autant de motifs pour espionner quiconque
présenterait, par ses idées ou celles de son entourage, sources hypothétiques d’actions, une
menace toute aussi potentielle à ces « intérêts fondamentaux de la Nation ».

Hors des frontières, quelle que soit la nationalité des cibles, il suffira aux services de se
référer à l’un de ces critères, aussi larges qu’imprécis pour déclencher la collecte massive des
données de connexion et communications, surveillance, sous la seule direction de l’exécutif. Le
texte autorise les services à mener des surveillances ciblées et, surtout, à recueillir
massivement des données de connexion et des communications sur des « zones géographiques, des
organisations, des personnes ou des groupes de personnes » : en bref, un permis général
d’espionner. Le tout permettant de constituer de véritables réserves d’informations,
mobilisables pendant des années, jusqu’à 8 ans pour les données chiffrées…

Dès lors qu’elles se trouveront à l’étranger, ni les professions dites protégées, ni les
personnes utilisant des numéros ou des identifiants « rattachables au territoire français » ne
bénéficieront ni des garanties d’un État de droit, ni même des conditions minimalistes de la loi
du 24 juillet 2015. Leur exclusion de la surveillance internationale n’est que de façade, le
texte organisant lui-même son propre contournement : il suffira de supposer qu’ils représentent
une « menace » pour les soumettre au non-régime de la surveillance internationale.

La nouvelle commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), présidée
par un ancien membre du SGDSN [3], fait de la figuration : pas même sollicitée pour donner un avis
préalable, elle devrait exercer un contrôle a posteriori. Sa marge de manœuvre au préalable
encadrée par les choix du Premier ministre (dans la définition des dispositifs de traçabilité
des interceptions, dans les modalités de la centralisation des renseignements collectés), la
CNCTR devra digérer, après coup, les autorisations données et les renseignements massivement
collectés, tout en restant dans l’ignorance des échanges d’information avec les services de
renseignement étrangers et de leurs méthodes. Qu’il soit d’initiative ou sur la saisine des
personnes visées -hypothèse d’école-, nul doute que le contrôle, par le double mécanisme de
recommandations non impératives au Premier ministre et de la saisine du Conseil d’État, sera en
réalité illusoire.

Le rythme et la publicité resserrés donnés à l’examen ce texte ne leurreront ni les
parlementaires ni les citoyens, qui avaient déjà identifié dans la loi du 24 juillet 2015 un
basculement dans la surveillance de masse et une mise en péril de nos principes démocratiques.
Nos élus doivent rejeter cette proposition de loi et le gouvernement, ouvrir un véritable débat
public sur la course à la surveillance internationale, voilà ce dont notre démocratie a besoin.


* Références *

1. L’Observatoire des Libertés et du Numérique regroupe le [Cecil][1], [Creis- Terminal][2], la
[Ligue des droits de l’Homme][3], le [Syndicat de la magistrature][4], le [Syndicat des Avocats
de France][5] et La Quadrature du Net.

[1] : http://www.lececil.org/

[2] : http://www.lecreis.org/

[3] : http://www.ldh-france.org

[4] : http://www.syndicat-magistrature.org/

[5] : http://www.lesaf.org

2. issu du renseignement

3. Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale. Une
première version de ce communiqué a annoncé à tort M. Delon comme ancien membre de la DGSE, nous
nous excusons pour cette erreur.


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