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Rapport 2023 de WeProtect Global Alliance Une escalade alarmante des abus sexuels d’enfants en ligne et l’arrivée de nouvelles menaces

octobre 2023 par WeProtect Global Alliance

Une augmentation vertigineuse de 87 % des matériels d’abus sexuels sur enfants signalés dans le monde ; les conversations sur les plateformes de jeux peuvent dégénérer en situation de sollicitations d’enfants en ligne en seulement 19 secondes ; de nouvelles sources de préjudices : l’extorsion financière et les images générées par l’intelligence artificielle.

L’organisation internationale WeProtect Global Alliance (https://www.WeProtect.org/) fait paraître aujourd’hui son 4ème rapport intitulé « Évaluation mondiale de la menace » qui révèle une augmentation de 87 %, depuis 2019, du volume de signalements de matériels d’abus sexuels sur enfants, portant les cas signalés à 32 millions dans le monde (Source : National Centre for Missing and Exploited Children). Les résultats de l’enquête appellent à l’impérieuse nécessité d’une approche concertée et à plusieurs niveaux pour protéger les enfants face à l’escalade des menaces, qui prennent des formes toujours plus variées et complexes.

Le rapport, qui documente les risques auxquels les enfants sont confrontés en ligne en 2023, révèle l’augmentation inquiétante de 360 % des images auto-produites à caractère sexuel par les enfants eux-mêmes, de 7 à 10 ans, entre 2020 et 2022 (Source : Internet Watch Foundation). De manière choquante, les conversations sur les plateformes sociales de jeux peuvent dégénérer en situations de sollicitations d’enfants à des fins sexuelles (dites « grooming ») à haut risque, en l’espace de 19 secondes seulement et au bout de 7 messages. En moyenne, ces épisodes de grooming durent 45 minutes, durant lesquelles l’agresseur gagne la confiance de sa victime avant d’en abuser. Les plus longs épisodes peuvent durer jusqu’à 28 jours. Les environnements sociaux de jeux facilitant la rencontre entre adultes et enfants et l’échange de cadeaux virtuels accroissent considérablement ces risques. Mais les prédateurs ne sont pas forcément anonymes : dans 60 % des cas, les abus sont perpétrés par des personnes connues de l’enfant (Source : Disrupting Harm Study). Des enfants qui souffrent d’un décalage important entre la perception du risque et les dangers effectivement encourus mais aussi la manière dont les agressions prennent forme.

L’arme de l’extorsion financière

L’étude révèle une augmentation significative de l’extorsion sexuelle financière, avec des chiffres qui passent de 139 cas rapportés en 2021 à plus de 10 000 en 2022. Les auteurs de ce type d’extorsions préparent et manipulent les enfants pour qu’ils partagent des images et des vidéos sexuelles d’eux-mêmes, puis les extorquent en échange d’un gain pécuniaire. Les garçons, moins conscients des risques que les filles, en sont les principales victimes. De nombreux prédateurs en ligne se font passer pour des jeunes filles et approchent principalement des garçons âgés de 15 à 17 ans via les réseaux sociaux. Ces préjudices mènent à des séries de cas où des enfants mettent tragiquement fin à leurs jours, une situation terrible alors que les garçons ne cherchent pas forcément à demander de l’aide. Dans certaines cultures, les garçons ont du mal à se considérer et à être reconnus comme victimes d’agressions.

Le rôle des nouvelles technologies dans la menace

Les nouvelles technologies et leur usage en ligne font peser des menaces toujours plus lourdes sur les enfants. Depuis début 2023, les prédateurs utilisant l’IA générative pour créer des supports d’abus sexuels sur enfants et exploiter les enfants sont toujours plus nombreux. L’ONG étasunienne Thorn constate que, si moins de 1 % des fichiers d’abus proviennent d’images générées par ordinateur, leur volume a augmenté de façon alarmante depuis août 2022. En la matière, l’Australie fait figure de pionnière et exige des grandes entreprises technologiques (Microsoft, Meta, Apple, Whatsapp...) qu’elles prennent des mesures pour que l’IA ne soit pas utilisée pour générer de fausses images et fausses vidéos d’abus.

Les minorités fragilisées

Les personnes âgées de 9 à 17 ans provenant de la communauté LBGTQI+ sont plus vulnérables, restant paradoxalement en contact avec des prédateurs les mettant mal à l’aise, expliquant qu’elles développent un lien décrit comme amical. L’exploitation sexuelle des enfants handicapés ou non-blancs est également plus fréquente. Cette situation doit mener à des prises d’initiatives personnalisées face à ces discriminations. En 2023, l’institut Economist Impact a mené une étude sur plusieurs pays dont la France et d’autres pays européens révélant que 79 % des enfants appartenant à un groupe dit « minoritaire » (basé sur l’ethnicité ou le handicap) ont subi au moins un préjudice durant leur enfance, contre 68 % chez les autres groupes d’enfants.

Iain Drennan, Directeur exécutif de WeProtect Global Alliance tire la sonnette d’alarme : "Notre dernier rapport témoigne de l’ampleur de la menace à laquelle les enfants sont confrontés en ligne. L’exploitation et les abus sexuels sur enfants, facilités en ligne et ce, dans le monde entier, requièrent toute notre attention et des actions immédiates. Les nouvelles capacités technologiques exacerbent les risques existants, et la situation ne diffère pas selon le pays. La sécurité des enfants n’est pas négociable. Pour éviter que davantage d’entre eux ne soient exposés au danger, les gouvernements, les fournisseurs de services en ligne, les organisations caritatives et les entreprises doivent redoubler d’efforts et travailler main dans la main pour protéger les enfants."

Combattre cette escalade des dangers via une réponse rapide et ambitieuse :

Il ne sera possible d’inverser la tendance que si l’ensemble des parties prenantes priorisent le sujet et s’engagent davantage, y compris via la loi. Les parties prenantes, notamment les gouvernements, fournisseurs de services en ligne, organisations de la société civile et intervenants, doivent :

● Investir dans des approches de santé publique de prévention : Donner la priorité à l’amont et investir dans des interventions ciblant les personnes qui ont commis, risquent de commettre ou de subir des abus. L’éducation à la sexualité et aux relations saines doit être promue. Si la réponse au problème n’intervient qu’après la maltraitance, nous manquons à notre devoir envers les enfants.

● Adopter une approche centrée sur l’enfant : Inclure la voix des enfants, consulter les jeunes, éclairer leurs choix quand ils sont en ligne. Et dans cet esprit, produire des contenus informatifs qui leurs sont accessibles et adaptés pour qu’ils naviguent en toute sécurité. Concevoir des interventions qui les responsabilisent, permettent d’identifier les abus et pouvoir invoquer la responsabilité des fournisseurs de services en ligne.

● Harmoniser les législations et régulations d’Internet au niveau mondial : Empêcher les délinquants d’exploiter les vides juridiques en promulguant des régulations du web similaires à l’échelle internationale. Faire en sorte que les plateformes prennent des mesures systématiques contre les agressions. Depuis 2021, la France a introduit des mesures et l’UE propose ce type de règlementations, également discutées dans d’autres pays.

● Adopter une approche de sécurité dès la conception (dite « safety by design ») : Mettre en œuvre des approches innovantes en matière de conception technologique qui donnent la priorité à la sécurité des utilisateurs en amont, et non en aval. Réduire le risque d’abus au maximum.

Sheema Sen Gupta, Directrice pour la protection de l’enfance à l’UNICEF et membre du Policy Board de WeProtect Global Alliance : « Les progrès technologiques rapides mettent à rude épreuve les systèmes de protection de l’enfance et des services judiciaires qui, dans de nombreux pays, sont déjà à bout de souffle. Nous devons nous concentrer de toute urgence sur la prévention à grande échelle, ce qui suppose que les gouvernements investissent dans des interventions fondées sur des données probantes. Il faut protéger les enfants contre les violences sexuelles et que les entreprises promeuvent la protection infantile dès la conception de leurs produits et services numériques afin d’éviter tout préjudice. Nous avons également besoin d’une législation solide pour protéger les enfants contre toutes les formes d’exploitation sexuelle en ligne, alors que les technologies évoluent rapidement. »

Cormac Keenan, Head of Trust and Safety chez TikTok : « Chez TikTok, notre objectif est de rendre notre plateforme inhospitalière à toute forme d’exploitation ou d’abus sexuel des enfants. La sécurité dès la conception est un élément essentiel de notre approche de prévention des préjudices et nous sommes heureux de voir qu’elle fait partie des recommandations du rapport sur l’évaluation mondiale des menaces. »

Kanga Rasi, responsable Africa Campaign chez Brave Movement : « Nous vivons dans un monde où chaque enfant - y compris les survivants tels que moi – et qui a un accès à Internet, est confronté à la menace des violences sexuelles, de l’exploitation et des abus. Même si la technologie peut apporter des changements positifs, nous ne pouvons pas tolérer la présence de prédateurs sexuels sur les plateformes numériques : mettant en danger nos enfants et les survivants et les soumettant à des traumatismes qui dureront toute leur vie. La violence sexuelle envers les enfants en ligne est une crise urgente qui transcende les frontières et nécessite une réponse mondiale unifiée. »

Karen Hollely, cofondatrice et directrice des opérations chez The Child Witness Institute : « Le rapport « Evaluation mondiale de la menace » de WeProtect Global Alliance fournit un suivi continu de la réponse mondiale à l’exploitation et aux abus sexuels d’enfants en ligne. Des efforts considérables sont déployés pour répondre à cet enjeu, et c’est grâce aux rapports tels que celui-ci que des programmes sont mis en place dans de nombreux pays et, surtout, que de nombreux enfants sont sensibilisés. Malgré ce travail, nous sommes tous engagés dans une course contre la montre pour trouver les meilleurs moyens d’empêcher les enfants d’être exploités, abusés, mal informés et égarés en ligne.

L’un des résultats du rapport est qu’il est de plus en plus évident que les enfants qui entretiennent des relations solides avec leurs parents ou d’autres personnes qui prennent soin d’eux, et où la communication est ouverte et bienvenue, s’en sortent mieux que ceux qui n’en bénéficient pas. Personne n’aura jamais une compréhension totale et complète des vastes possibilités d’Internet, mais si nous pouvons nous asseoir et en parler avec nos enfants, nous avons une meilleure chance de leur fournir, ainsi qu’à nous-mêmes, les ressources nécessaires pour y naviguer en toute sécurité et de manière positive. »


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