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Passeport immunitaire : la solution doit avoir une envergure européenne

mai 2020 par Marc Norlain, CEO d’ARIADNEXT

Après l’appli StopCovid, c’est au tour du passeport immunitaire de faire son entrée sur la scène publique. Un passeport immunitaire, oui, mais qui doit dépasser le cadre national pour avoir une réelle raison d’être. Déployé à l’échelle européenne, il permettrait d’offrir une réponse technologique à la pandémie et un outil puissant de cohésion des pays. Marc Norlain, CEO d’ARIADNEXT, entreprise rennaise spécialisée dans la vérification d’identité et la création d’identité numérique, offre des pistes de réflexion sur le sujet.

Un passeport immunitaire, qu’est-ce que c’est ?

Il s’agit d’un laissez-passer qui va permettre à la personne qui le détient de prouver qu’elle est immunisée contre le covid-19. Cela implique que la personne en question ait auparavant été testée, par voie sérologique ou virologique, et se soit révélée immunisée. Ce passeport lui permettra de se déplacer librement sur tous les territoires qui le demanderont pour circuler. À titre d’exemple, la Corse est en train de mettre en place un « green pass » pour entrer sur son territoire.

Qu’en est-il de la question de l’immunité ?

Je ne dispose pas de l’expertise du corps médical, mais du point de vue d’un dirigeant d’entreprise il est aujourd’hui difficile de savoir si un collaborateur est immunisé, et si oui pour combien de temps. En l’absence de ces réponses, reprendre une activité normale est difficile car elle empêche la délivrance de passeports immunitaires fiables.

Et à cela s’ajoute un autre problème : si l’on ne délivre le passeport qu’aux personnes immunisées et que celles-ci ont le droit d’aller travailler, d’autres personnes n’ayant pas été en contact avec le virus, donc non immunisées, ne peuvent de ce fait pas circuler librement. On pourrait donc imaginer des cas extrêmes où certains seraient tentés d’attraper le virus pour obtenir ce précieux sésame.

Quelle différence avec l’application StopCovid ?

Ce sont deux solutions totalement différentes. L’application StopCovid nécessite de stocker une importante quantité de données et de suivre en permanence les déplacements du téléphone. De plus, au regard de l’approche choisie par la France, elle risque de ne pas être compatible avec la totalité des téléphones, notamment les iPhone. D’un point de vue technologique, on aurait pu aller plus loin, mais l’intérêt politique l’a emporté et conduit à la création d’une application qui aurait pu être plus respectueuse de la vie privée.

Le passeport immunitaire a une utilisation beaucoup plus simple et ne nécessite pas de stockage massif de données. S’il voit le jour, il sera délivré pour une durée déterminée et sans nécessiter de mises à jour régulières comme l’application StopCovid. L’ensemble de la population pourra de plus y avoir accès, car le format papier comme numérique est supporté par une sécurisation 2D-DOC. Il pourra être délivré par un laboratoire ou un médecin et peut-être même par soi-même, après avoir eu accès à son dossier médical en ligne.

Quels sont les freins actuels à la mise en place de ce dispositif ?

1) La gestion des données est le premier point
Il y a deux manières d’aborder la chose : soit par une gestion simple, où le passeport n’aura en son sein que des informations telles que les nom, prénom, date de naissance, motif de sortie, validité et photo d’identité ; soit par gestion plus complexe où le passeport s’apparenterait davantage à une application de traçage.

2) Deux applications qui ne répondent pas aux mêmes enjeux
L’application StopCovid se veut une mesure préventive là où le passeport immunitaire constitue une réponse a posteriori, et qui peut se révéler efficace pour certaines professions comme le personnel médical – celui des EHPAD, par exemple, ou pour les salariés amenés à se déplacer régulièrement sur le territoire national.

3) L’absence d’uniformité et de cohérence européenne
Si l’on observe d’une part l’application StopCovid et d’autre le passeport immunitaire, aucun ne fait l’objet d’un traitement européen. C’est ce que l’on reproche aujourd’hui aux pays dans leur gestion de la crise : chacun avance de son côté, sans concertation européenne, mais en cherchant pourtant la même finalité. Le résultat est que chaque passeport fonctionnera sur son territoire mais une fois hors des frontières il n’y aura plus de suivi. Or l’on sait que le véritable problème réside dans les déplacements massifs de population que génère la reprise du travail mais plus globalement la reprise d’une vie active.
S’il doit y avoir une coopération européenne pour sortir de la crise – et on l’espère – il faut qu’elle porte sur des moyens technologiques et non uniquement financiers. Notre voisin allemand avance à pas-de-géant sur le sujet du passeport immunitaire, et si la France y réfléchit ce n’est pas sa priorité dans la mesure où seuls 7 % de la population serait potentiellement déjà immunisée. C’est donc une réflexion sur le long terme qu’il faut amorcer, pour permettre de sécuriser les déplacements de population au sein de l’Union.


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