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Objets connectés : quel sera le sort de nos données ?

avril 2015 par Emmanuelle Lamandé

Selon le Gartner, 26 milliards d’objets connectés seront parmi nous dans le monde en 2020. Ce sont donc des volumes énormes de données qui vont être créés, véhiculés et analysés, au travers de multiples capteurs présents dans l’entreprise, la maison, et même sur l’individu. Quels seront les principaux usages de ces objets ? Quels risques ? Quels avantages ? Quel sera le sort de nos données ? Un sujet mis à l’honneur à l’occasion de la 3ème édition de ROOMn, lors d’une table ronde animée par Florence Puybareau, Journaliste.

Les objets connectés industriels représentent actuellement un axe fort de développement, explique Jean-Christophe Lecosse, Directeur du CNRFID. Cependant, ceux-ci sont différents des objets connectés grand public, les usages et l’utilité n’étant pas les mêmes dans le monde industriel. L’objectif, y compris au niveau de l’Etat, est aujourd’hui de coordonner les différentes initiatives, afin de s’inscrire dans une démarche transverse concernant les plans d’actions.

A l’origine, l’objet connecté est effectivement une mode grand public. On observe d’ailleurs déjà de multiples usages dans notre quotidien. On peut citer, par exemple, le frigo intelligent, qui assure entre autres le contrôle des températures... Les cas d’usage d’ores et déjà opérationnels sont nombreux et amenés à se démultiplier dans les années à venir. En effet, via l’objet connecté, on ajoute une couche de prédiction, qui va permettre de « mieux » prévenir et agir sur l’objet en fonction du contexte.

A l’heure actuelle, nous sommes capables d’obtenir des réseaux de réseaux à partir de capteurs et de coupler les informations entre elles. Demain, nous pourrons y ajouter de l’automatisation et de l’interopérabilité entre les machines.

L’enjeu économique se trouve sur la donnée et la capacité à interpréter les données. Tous les acteurs qui vont venir gérer l’ensemble de ces données, les héberger…, deviendront des acteurs majeurs de cet écosystème.

A l’avenir, l’objectif sera de trouver ce qui est efficient dans le domaine grand public, et de voir comment ces « gadgets » pourront servir le monde industriel. En effet, les usages et les besoins ne sont pas les mêmes que pour le grand public, et, dans le monde industriel, on ne déploiera pas une solution qui n’a pas de réelle valeur, outre l’aspect lucratif. Parmi les projets qui sont actuellement à l’étude dans le monde industriel, on retrouve par exemple :
 Les chaussures équipées de capteurs de poids : celles-ci, portées toute la journée, permettront de mieux déterminer les charges et les surcharges des équipes ;
 Une technique permettant de déterminer la vitesse, l’usage… des pneus, inspirée de ce qui est fait avec les ballons de basket.

Les objets connectés : une avancée pour le capital santé et bien-être des individus ?

A l’heure actuelle, les objets connectés sont d’ores et déjà rentrés dans le business, constate Hicham Badreddine, Directeur Digital de Malakoff Médéric, et s’inscrivent même pour certains dans un modèle industriel, chez les constructeurs automobiles ou les assureurs par exemple. Dans le domaine de la santé, c’est plus compliqué. Les données de santé sont plus sensibles, les gens sont donc plus réticents quant à l’utilisation qui en est faite. Pourtant, les projets d’utilisation des objets connectés en vue d’améliorer la santé, la prévention médicale et le bien-être des personnes ne manquent pas. D’autant que les entreprises doivent aujourd’hui faire face à un fort taux d’absentéisme de leurs salariés pour raisons médicales, ce qui représente pour elles un coût certain. Le capital d’un groupe, quel qu’il soit, repose donc aussi sur la santé et le bien-être de ses salariés.

Le Groupe Malakoff Médéric participe, en ce sens, au programme de télémédecine Vigisanté, visant à dépister, accompagner et suivre les personnes atteintes d’hypertension artérielle. Outre le dépistage en entreprise des salariés qui le souhaitent, ce programme offre une chaîne complète de services utilisant des dispositifs médicaux communicants à partir du domicile (auto-tensiomètre, balances connectées…), une plateforme médicalisée d’accompagnement des patients par téléphone et Internet, ainsi qu’un système expert à destination du médecin traitant pour faciliter le suivi de son patient. Le programme Vigisanté repose sur une démarche volontaire des salariés et est encadré par un respect strict de l’anonymat des données de santé.

D’autres sujets plus larges pourront être traités et étudiés à l’avenir : par exemple la pénibilité au travail. Ce type d’étude pourrait permettre, en fonction des résultats, de repenser la façon de travailler, de revoir les postures de travail, d’observer les effets des produits chimiques sur les salariés… De nombreux aspects pourraient ainsi être approfondis, afin d’améliorer dans la mesure du possible la santé et le bien-être des individus. Une réflexion est aussi en cours au niveau médical quant à la possibilité de prescrire des objets connectés aux patients.

Les données à caractère personnel au cœur de tous les enjeux

Quel cadre juridique entoure ce phénomène ? Le principal enjeu juridique concerne les données à caractère personnel, souligne Garance Mathias, Avocat à la Cour, Cabinet d’Avocats Mathias. Tout est aujourd’hui donnée à caractère personnel, le premier outil est donc de s’assurer que la collecte des données est bien encadrée.

Le règlement européen relatif à la protection des données à caractère personnel va venir renforcer l’obligation du consentement préalable de la personne et de son information quant aux utilisations qui en seront faites. Cela existait déjà dans la loi de 1978, cependant le projet de règlement va plus loin en imposant le consentement « explicite » de l’utilisateur. Il faudra s’assurer que la personne ait bien compris et accepté le traitement qui sera fait de ses données. Elle devra également être informée si jamais l’information est transmise à des partenaires. Le consentement va donc être un peu plus complexifié. Il faut que les citoyens sachent où vont leurs données, quelle utilisation en sera faite, combien de temps seront-elles gardées ? C’est essentiel ! Surtout avec les objets connectés qui augmentent considérablement le nombre de données captées et échangées en permanence.

La question est de savoir comment on s’assure du consentement de la personne. Le plus souvent, cette étape de consentement repose sur les Conditions générales de vente ou d’acceptation d’un service. Le problème est que, dans la grande majorité des cas, les gens les acceptent sans les lire...

De plus, celui qui va être le responsable du traitement a l’obligation légale de sécuriser ces données, une tâche de plus en plus complexe de par ce foisonnement. Sans compter le nombre de partenariats qui ne cesse de croître avec ce type de services, avec des assureurs par exemple. Cela pose de nombreuses questions relatives à la vie privée, à la sécurité, mais aussi à la responsabilité des uns et des autres… Quel sera la responsabilité et l’impact en termes d’image sur l’ensemble de la chaîne d’acteurs en cas d’incident par exemple ?

Plus la sécurité est forte et strictement encadrée, plus les utilisateurs se sentiront en confiance

En raison de ses réglementations strictes notamment, les entreprises françaises partent-elles, en la matière, avec les mêmes chances que les autres pays ? Y a-t-il trop de contraintes en France ? Pour Hicham Badreddine, non, car plus la sécurité est forte et strictement encadrée, plus les utilisateurs se sentiront en confiance, et c’est un facteur essentiel à la réussite de ce type de projets.

Cela représente d’ailleurs aussi une valorisation, estime Me Garance Mathias. Si le consentement est là, si les protections sont mises en place, alors les objets connectés apporteront du positif à l’utilisateur. Sans compter que de nouveaux droits apparaissent aujourd’hui, principalement via le règlement européen et le travail mené conjointement par le G29 et la CNIL, comme le droit à la déconnexion ou le principe d’accountability.

Toutefois, que ce soit au niveau juridique, étatique, technologique, économique..., c’est un travail qui doit être mené de concert avec tous les acteurs et faire l’objet d’une démarche transverse.


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