Rechercher
Contactez-nous Suivez-nous sur Twitter En francais English Language
 











Abonnez-vous gratuitement à notre NEWSLETTER

Newsletter FR

Newsletter EN

Vulnérabilités

Se désabonner

Nicolas Aubé, Président de CELESTE : qui va déployer la fibre optique en dehors des grandes villes ?

février 2011 par Nicolas Aubé, Président de CELESTE

Les règles du déploiement de la fibre optique en France sont désormais
connues. L’Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des
Postes (ARCEP) vient de publier sa décision qui organise ce déploiement en
dehors des « zones très denses », donc hors des grandes villes. Voici
quelques clés de décryptage.

Le déploiement dans les grandes villes avait déjà fait l’objet d’une
décision fin 2009, à l’initiative des opérateurs télécoms. Ceux-ci doivent
déclarer leur intérêt pour le fibrage d’une zone donnée, en le finançant
seuls ou en co-investissement avec leurs concurrents s’ils souhaitent
investir sur la même zone. Dans ces grandes villes, quatre fibre optiques
seront installées pour chaque logement. Cela signifie qu’à terme plusieurs
opérateurs peuvent être présents simultanément dans les habitations.
Plusieurs offres coexistant, les abonnés pourront changer assez facilement
d’opérateur.

Une seule fibre par logement

Qu’en est-il en dehors de ces très grandes villes ? Le schéma de
déploiement est différent. Le fibrage d’une habitation ou d’une entreprise coûte plus cher, car les distances de fibre sont plus importantes, et les immeubles
comportent moins de logements. Il a donc été décidé qu’une seule fibre
optique équiperait chaque logement. Celle-ci sera raccordée à un « point
de mutualisation », couvrant au minimum 1 000 logements dans les villes, et
300 logements dans les zones peu denses. Pour un abonné, le passage d’un opérateur à un autre se fera avec une coupure de service, un peu comme le
dégroupage d’une ligne ADSL aujourd’hui, ce qui pourra causer quelques
difficultés pour les utilisateurs.

Ce déploiement sera à l’initiative des opérateurs télécom, des gestionnaires
de zone ou des collectivités. Ces organismes auront le rôle d’« opérateurs
d’immeubles ». Ils proposeront un découpage d’une commune en zones de 1
000 logements minimum dans les villes de moyenne importance, et 300 dans les zones rurales. Lorsqu’ils commenceront à déployer la fibre dans une de ces
zones, ils devront s’engager à fibrer l’intégralité de cette zone en 5 ans :
sous réserve d’accord des propriétaires ; soit la fibre sera installée dans
chaque logement, soit elle sera prête à l’être sur demande des abonnés.
Dans une même commune, on pourra donc avoir une zone fibrée à 100% d’un côté, et une zone sans fibre de l’autre.

Un découpage en zones de 1 000 logements

Pourquoi ce chiffre de 1 000 logements (et 300 en zone rurale) ? Cette
limite n’est pas évidente a priori ; puisqu’on a aujourd’hui une structure
différente pour le réseau téléphonique et l’ADSL. Les répartiteurs
téléphoniques équipent une zone de l’ordre de 10 000 lignes, soit dix fois
plus. Le déploiement en ADSL a suivi ce schéma puisque les équipements
centraux, les « DSLAM », se situent dans ces répartiteurs principaux. Ce
schéma initial est à l’origine des « zones blanches » de l’ADSL, car les
habitants qui se trouvent à plus de 5 km du répartiteur ne peuvent pas
avoir l’ADSL, à cause des limitations de cette technologie, et ne peuvent pas
changer de répartiteur, étant donné la structure de distribution du réseau
téléphonique. La seule solution pour eux est l’équipement en ADSL des
sous-répartiteurs.

La fibre optique ne présente plus la limite technique de 5 km, puisqu’on
peut éclairer une fibre avec des équipements communs jusqu’à 20 km voire
plus. Pourquoi n’avoir pas choisi des zones de 10 000 lignes pour la fibre
optique ? Le choix du chiffre de 1 000 lignes résulte d’un compromis
technique entre les opérateurs qui ont choisi la technique du « PON », et
celle du « point à point ». Le PON permet de diviser une fibre initiale en
un arbre de plusieurs fibres pour raccorder des logements. C’est la
technologie choisie par Orange par exemple. Le point à point utilise une
fibre unique par logement. Cette structure a été choisie par Free
notamment.
Les opérateurs PON ont besoin que le point central de raccordement pour un
groupe d’immeubles ne soit pas trop éloigné des logements. Une structure
de distribution depuis les répartiteurs n’aurait pas été possible pour ces
opérateurs. Ils demandaient au contraire un point central de raccordement
très proche des immeubles. En revanche, ce schéma n’aurait pas convenu aux
opérateurs « point à point », car les chemins de câbles de distribution,
proches des immeubles, auraient été vite saturés par le nombre de fibres
posés par tous les opérateurs.
Ce compromis à 1 000 logements correspond à des points centraux, dits « de
mutualisation », au niveau des sous-répartiteurs téléphoniques. Le schéma
de déploiement de la fibre est donc le suivant : une seule fibre entre chaque
logement et son sous-répartiteur téléphonique, utilisable par tous les
opérateurs qui pourront la « dégrouper » ; de là tous les opérateurs
repartent vers leur central optique, en mutualisant ou non le signal sur
leurs fibres.

Qui va déployer la fibre ?

Le cadre technique est désormais fixé, on peut considérer que c’est un
juste compromis car il laisse le choix de leur technologie aux opérateurs et il permet d’utiliser efficacement les infrastructures de France Télécom déjà
installées dans les villes.

L’initiative du déploiement est laissée aux opérateurs télécoms. Ceux-ci
vont choisir les zones de 1 000 logements dans telle ou telle commune
suivant leur intérêt commercial. Il y a néanmoins une certaine péréquation
car l’ensemble de la zone de 1 000 logements devra être équipée, ce qui
évite les trous de couvertures liés à des îlots jugés non rentables ou
plus éloignés physiquement. Toutefois, il est probable que des zones entières
soient laissées de côté dans un premier temps.
En revanche, ce palier de 1 000 logements impose des barrières à l’entrée
importantes : l’investissement financier et l’organisation de ce déploiement
fait qu’il sera impossible pour des petites structures privées ou publiques.

On peut donc imaginer deux types d’acteurs pour ce déploiement de la
fibre. D’une part, les opérateurs « grands public », qui ont commencé à le faire
en zone très denses, et qui ont fait des annonces sur certaines villes
d’importance moyenne. D’autre part, les collectivités. Celles-ci devront
s’organiser au moins à l’échelle de la commune, voire à celle des
communautés de communes ou des départements. Il est possible qu’elles
deviennent elles-mêmes « opérateurs d’immeubles » pour équiper les
logements de leurs administrés. C’est la continuité du mouvement entamé par
certaines collectivités depuis 5 ans, avec le lancement de délégations de service public afin de fibrer les zones d’activités, les centraux téléphoniques,
ou directement certains abonnés, comme à Pau ou Saint Quentin en Yvelines par exemple. Grâce à ces initiatives publiques, les opérateurs, comme CELESTE, qui équipent les entreprises peuvent d’ores et déjà proposer la fibre
optique à la plupart des entreprises du pays.

La fibre, un service public ?

Le fait de choisir des zones de 1 000 logements inquiète certaines
collectivités. En effet, celles-ci craignent que les opérateurs télécom ne
fassent leur marché avec les zones rentables, et ne leur laissent que les
zones non rentables. Cela aurait un double effet négatif pour elles :
d’abord, ces zones seront probablement plus coûteuses à raccorder ; puis
les collectivités ne pourraient pas gagner de l’argent sur les zones rentables
afin de subventionner ces zones reculées.
L’enjeu pour elles va être de négocier avec les opérateurs cette péréquation
dans le découpage des mailles territoriales en zones de fibrage. Elles
pourront leur proposer de co-investir en échange de critères liés à
l’aménagement du territoire.
La fibre ne sera probablement pas un service public, mais c’est une
opportunité de rapprochement entre les opérateurs et les collectivités pour
établir une vision conjointe. Rendez-vous en 2025, nous devrions alors tous
être fibrés !


Voir les articles précédents

    

Voir les articles suivants