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La pige immobilière légitimée dans la gestion des données à caractère personnel ?

avril 2019 par Antoine Chéron, avocat associé de ACBM Avocats, www.acbm-avocats.com

Le traitement des données à caractère personnel fait l’objet depuis quelques temps de nombreuses interrogations. Dans sa décision rendue le 12 avril 2019, la Cour d’appel de Paris a fortement encadré la possibilité d’agir en concurrence déloyale concernant la collecte de données à caractère personnel.

Ce litige opposait la société ACCESS2OWNERS, commercialisant un service de pige immobilière et un service de prospection commerciale par SMS, et la société DIRECTANNONCES, spécialisée dans la vente immobilière.

Grâce à un logiciel performant, la société ACESS2OWNERS permet aux professionnels de l‘immobilier d’obtenir quotidiennement des piges immobilières en fonction des souhaits émis par ses clients. Ces derniers sont ainsi informés en temps réel des annonces qui sont déposées sur une grande partie des sites d’annonces immobilières en ligne et qui correspondraient à leurs critères de sélection. Tandis que la société DIRECTANNONCES collecte grâce à un logiciel les nouvelles annonces immobilières parues sur plusieurs supports afin de les communiquer à ses clients professionnels du marché de l’immobilier.
Estimant que la société ACCESS2OWNERS manquait à son obligation de collecte loyale et licite des données à caractère personnel des annonceurs en s’abstenant de les informer de cette collecte et en s’abstenant de solliciter leur accord préalable pour toute prospection commerciale par SMS et que ce comportement lui serait préjudiciable, la société DIRECTANNONCES a assigné la société ACESS2OWNERS en concurrence déloyale devant le Tribunal de commerce de Paris.

Le Tribunal de commerce de Paris a, le 2 octobre 2017, débouté la société défenderesse de l’ensemble de ses exceptions d’incompétence, fins de non-recevoir, demandes, fins et conclusions. Il a affirmé que la société demanderesse avait bien intérêt et qualité à agir et a ordonné à la société défenderesse de cesser toute prospection commerciale directe par voie de communications électroniques aux motifs qu’elle ne respectait pas les dispositions légales.

La société défenderesse a interjeté appel sollicitant l’infirmation de ce jugement.
La Cour d’appel de Paris a, le 12 avril 2019, infirmé le jugement en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence et la fin de non-recevoir de la société défenderesse et débouté la société demanderesse de l’ensemble de ses demandes.

Focalisons-nous sur les motifs de cette décision. Dans un premier temps, la Cour d’appel de Paris a considéré que le Tribunal de commerce de Paris était bien compétent pour apprécier dans le cadre d’une action en concurrence déloyale les manquements aux dispositions légales concernant les collectes de données à caractère personnel. La CNIL n’a donc pas une compétence exclusive en la matière.

Dans un second temps, la Cour d’appel a énoncé que l’intimé avait bien qualité et intérêt à agir du fait du prétendu trouble commercial qu’elle subissait.
Mais surtout la Cour d’appel s’est prononcée concernant les actes prétendument constitutifs d’une concurrence déloyale. En effet, elle a infirmé le jugement considérant que « la société Direct ne rapporte pas à suffisance la preuve, qui lui incombe, de faits de concurrence déloyale ou illicite. »

Par conséquent, la Cour d’appel clarifie la situation. L’intimé devait bien rapporter la preuve des agissements qu’elle considérait comme constitutifs d’une concurrence déloyale. Non seulement le constat d’huissier de justice invoqué mais aussi la lecture des publicités et des conclusions ne suffisaient pas à prouver les pratiques illicites à l’encontre de l’appelante.

Quelques remarques sur cette décision :

Les entreprises apparaissent tellement omnibulées par ces règles sur les traitements de données à caractère personnel, et ce d’autant plus depuis que le RGPD est entré en vigueur, qu’elles se permettent d’interférer dans les collectes des données personnelles effectuées par leurs concurrents.
En effet, il est nécessaire avant tout de rappeler que les responsables de traitement ont des obligations précises lorsqu’ils effectuent des traitements de données à caractère personnel. C’est notamment ici qu’interviennent les dispositions de l’article 32 et 38 de la loi du 6 janvier 1978 qui imposent d’informer la personne, en l’espèce l’annonceur, de la collecte de ses données à caractère personnel, de l’identité du responsable de traitement, des finalités du traitement, des destinataires des données, de l’existence et des modalités d’exercice de ses droits ; mais aussi l’article L34-5 du code des postes et des communications électroniques qui exige au responsable de traitement de recueillir le consentement exprès et préalable de l’annonceur avant toute prospection commerciale par voie de communications électroniques.
Au titre de ces obligations, les responsables de traitement s’exposent en cas de manquements potentiels à une mise en demeure de la part de la CNIL mais surtout à une amende administrative.

Toutefois, vouloir agir en concurrence déloyale à l’encontre de son concurrent est une chose, mais agir en concurrence déloyale à l’encontre de son concurrent estimant qu’il n’a pas respecté ses obligations relatives aux collectes de données personnelles est très risqué. La preuve en est…


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