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Interviews

Jérôme Grémaud, Ingénieur commercial chez JERLAURE : L’externalisation de tout ou partie de l’IT est-elle une bonne solution ?

janvier 2012 par Marc Jacob

Prendre la décision d’externaliser son Datacenter est un choix souvent difficile à faire. Plusieurs critères sont à prendre en compte comme le coût, la faisabilité de construire son propre Datacenter… mais aussi certains critères subjectifs. Dans tous les cas, cette décision ne peut être prise, sans qu’une analyse la plus rationnelle possible n’ait été menée en amont. Elle fait souvent aussi l’objet de discussions parfois animées entre la Direction générale, le DAF et le DSI qui doivent choisir entre OPEX et CAPEX…

GSM : Quels sont les critères pesant sur une décision d’externalisation ?

Jérôme Gremaud : Les critères sont nombreux et très différents en fonction du type d’entreprise et du contexte.
Le critère principal et décisif est la faisabilité de construire un Datacenter d’entreprise. Si la topologie du site ne le permet pas, si l’énergie électrique et les liens télécoms disponibles sont insuffisants, le choix de l’externalisation est évident.
L’autre critère important est le coût. L’exercice consiste à analyser le coût d’investissement d’un Datacenter interne, de le comparer au coût d’un hébergement externe et de définir le ROI. Attention à la qualité des données d’entrée ! Si le budget d’investissement est surévalué et le coût d’hébergement sous évalué, le ROI en résultant sera trop long et susceptible de faire basculer la décision vers un mauvais choix.
Un autre critère plus subjectif, mais souvent mis en avant, est la volonté de l’entreprise de se concentrer sur son cœur de métier, en externalisant tout ou partie de ses infrastructures IT.
Enfin, la mise en place d’un PRA impose d’externaliser une partie des infrastructures IT sur un site distant.

GSM : Ces critères sont-ils systématiquement analysés ?

Jérôme Gremaud : Une décision aussi stratégique doit faire l’objet d’une analyse rationnelle, même s’il est toujours possible d’impacter le résultat avec quelques critères subjectifs. Notre offre intègre d’ailleurs une mission d’accompagnement au choix stratégique d’un hébergement interne ou externe où tous les critères cités ci-dessus sont passés à la loupe. Comme nous l’avons vu, certains critères sont sans appel, notamment la mise en place d’un PRA ou l’impossibilité de construire sur le site de l’entreprise. Par contre, le paramètre financier mérite beaucoup plus d’attention. Nous connaissons plusieurs entreprises qui ont externalisé sur la base de critères financiers erronés, et le retour en arrière est maintenant très difficile.
Le ROI d’une construction en interne est compris entre 3 et 5 ans et il est maintenant démontré, y compris par Gartner, qu’un Datacenter en interne est moins coûteux.

GSM : Selon vous, quelle est la meilleure solution lorsque les deux sont possibles ?

Jérôme Gremaud : La meilleure solution est celle qui ressort dans l’analyse objective préalable. Nous sommes à la base concepteur et constructeur de Datacenters et donc à même d’affiner un budget de construction. Nous proposons également un certain nombre de missions destinées à éclairer les choix stratégiques, hébergement interne ou externe, mode d’hébergement et choix d’un hébergeur.
Un projet d’externalisation émane soit de la direction générale ou financière, fortement motivée par des baisses de coût, soit par la DSI qui souhaite se débarrasser des contraintes de disponibilité.
Notre rôle consiste à fournir des éléments de réflexion objectifs, clairement exploitables en phase de décision. Chaque entreprise fait ensuite ce qu’elle veut selon la stratégie qu’elle souhaite mener et ses possibilités financières du moment. Nous n’avons qu’un rôle de conseil sur le choix final.

GSM : Savez-vous que l’on prévoit une croissance de l’hébergement externe ?

Jérôme Gremaud : Oui, nous avons vu les études de marché. Nous assurons une veille marketing quotidienne et analysons rigoureusement ce qui se passe dans notre sphère économique. En effet, certaines études de marché ont dévoilé une hausse de l’externalisation des données jusqu’en 2015. Ceci est dû au modèle « Cloud Computing », qui à ce jour fait l’objet d’un véritable raz de marée marketing, sans avoir véritablement fait ses preuves à ce jour.
D’autres scénarios prévoient l’inverse. Il sera très difficile de construire de gros Datacenters dans les grandes villes. Paris est aujourd’hui quasiment saturé et les investisseurs traditionnels ne prendront pas le risque de décentraliser en région. Pourtant, il existe en province des sites prédisposés à devenir des Datacenters capables de faire rougir les plus grands sites parisiens. Il faut dire aussi que la plupart des DSI prônant l’externalisation n’acceptent pas d’être trop éloignés de leurs serveurs et qu’il existe aussi des contraintes techniques dans le cadre d’un PRA, limitant à quelques kilomètres la distance entre les deux sites.

GSM : Ne pensez-vous pas que la première raison de la croissance de l’hébergement externe est le fait d’une meilleure rentabilité ?

Jérôme Gremaud : Le fait d’externaliser coûte plus cher. Nous soutenons cela depuis plusieurs années et aujourd’hui Gartner publie une étude sur les datacenters et affirme qu’il est plus rentable de construire son propre datacenter que d’aller à l’hébergement.

Nous maintenons que le ROI d’un Datacenter d’entreprise est inférieur à 5 années, coût de maintien en conditions opérationnelles inclus. Il n’y a pas de coûts cachés contrairement à l’hébergement externe où chaque service est facturable en supplément du contrat de base. Les coûts énergétiques en perpétuelle hausse sont mesurés et maîtrisés.

GSM : Externaliser revient à se décharger d’une lourde responsabilité ?

Jérôme Gremaud : Il est vrai que si une direction générale reste désespérément sourde aux demandes argumentées d’un DSI visant à investir pour réhabiliter et sécuriser le Datacenter d’entreprise, il sera préférable pour lui d’orienter sa demande vers l’externalisation, afin d’assurer la disponibilité du système d’information et se décharger de cette lourde responsabilité.
Dans le cas contraire, un Datacenter d’entreprise correctement construit, sécurisé et maintenu ne fait pas parler de lui. Les DSI qui utilisent nos Datacenters passent à ma connaissance des nuits tranquilles.

GSM : Est-il vrai que la DAF et la DSI ne se comprennent pas toujours et de fait, n’ont pas les mêmes points de vue concernant l’hébergement interne ou externe ?

Jérôme Gremaud : En effet, la DAF et la DSI ont une vision et des enjeux différents : la DAF envisage le court terme et la DSI agit pour du long terme. Suite à une enquête, nous avons également constaté que les DSI d’aujourd’hui ont de moins en moins la maîtrise de leur budget informatique et de plus en plus de responsabilités, comme être à la pointe des nouvelles technologies.

La DAF veut aujourd’hui économiser sur les investissements informatiques. Elle voit que l’hébergement externe transforme le CAPEX en OPEX, tout en réduisant les charges salariales et cela lui convient parfaitement.
La DSI souhaite garder la maîtrise de son système d’information et de son propre Datacenter. Elle doit démontrer en permanence l’intérêt financier sur le long terme. C’est pourquoi nous travaillons de façon transversale avec la DSI et la DAF.

GSM : Sommes-nous assurés de ne perdre aucune donnée quand nous allons à l’hébergement ?

Jérôme Gremaud : Vous ne serez assurés dans aucun des cas. La perte de données peut arriver si vous n’avez pas de salle miroir. Les hébergeurs ont un argumentaire typiquement Marketing en vous garantissant un risque zéro. Mais il faut être réaliste, le risque zéro n’existe pas. Que vous ayez les données hébergées chez vous ou chez un prestataire de service, il y a toujours un risque, certes minime mais pas inexistant.