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Jarno Limnéll, Stonesoft : les implications de la cyberattaque de SEA

avril 2013 par Jarno Limnéll, Docteur ès Sciences Militaires et Directeur de la Cyber-Sécurité chez Stonesoft

Il y a quelques jours le conflit en cours en Syrie s’est manifesté dans le cyberespace. Un groupe de hackers dénommé SEA (Syrian Electronic Army) a réussi à alimenter le compte Associated Press de Twitter avec une fausse actualité, mentionnant une explosion à la Maison Blanche qui aurait blessé le président Obama. Cette diffusion d’un instant a été re-tweetée d’innombrables fois et a temporairement fait chuter le Dow Jones. L’événement témoigne de l’importance du cyberespace dans tous les conflits contemporains et les conséquences graves qui en découlent à l’échelle mondiale.

SEA a pu non seulement donner une mauvaise image à l’AP, mais a aussi provoqué une réaction forte sur le marché financier mondial. L’indice moyen industriel du Dow Jones a plongé de 143 points après le faux tweet. Malgré la récupération rapide du marché, l’événement perdurera dans la mémoire collective. Il aura une influence sur la confiance publique et prouve encore le caractère volatile du marché financier et l’importance du temps dans la diffusion de l’information.

SEA a aussi revendiqué le piratage des comptes Twitter ou les sites Web de la BBC, CBS, Al Jazeera et NPR. L’organisme prétendant agir contre l’image déformée du conflit syrien promue par l’Occident est généralement perçu comme étant en faveur du régime Assad. Les actions de SEA indiquent l’importance croissante de la guerre de l’information, avec l’intensification du combat autour des images et de la vérité dans l’ère de conflits cyber.

Or, la vérité n’est pas l’unique enjeu. L’information est à la fois un atout à protéger et une arme à utiliser en matière d’attaque et de défense. Les agissements dans le cyberespace ne dépendent pas des moyens matériels ou de la distance ; c’est pourquoi tout le monde peut être touché à partir de n’importe où. Jusqu’ici, SEA a utilisé le piratage pour modifier l’information ou communiquer des renseignements confidentiels. Ces actions dans le cyberespace ont des effets graves sur l’espace physique, comme a pu démontrer la réaction du Dow Jones. Mais jusqu’où SEA est-il capable d’aller ? La question s’applique en même temps à tout autre acteur profitant des possibilités offertes par l’enchevêtrement du cyberespace et les conflits dans l’espace physique.

Le cyber-conflit en Syrie a élevé SEA au rang d’un acteur capable d’influencer la politique mondiale. La politique mondiale n’est donc plus une arène réservée aux acteurs de l’État, car ces acteurs ne peuvent pas contrôler le cyberespace comme l’espace physique. L’effondrement de l’importance de la distance et des coûts financiers d’une attaque a permis l’émergence de nouveaux acteurs politiques qui doivent être pris au sérieux. Peu importe que l’on soupçonne que le régime Assad se trouve directement derrière SEA ou que cet incident relève d’une activité de passe-temps pour des adolescents ; l’importance du cyberespace et son pouvoir au niveau de la politique mondiale est bel et bien posée.

Par ailleurs, le conflit en Syrie a mis en vedette une autre forme de cyber-querelles, celle de la vantardise entre SEA et ANONYMOUS. ANONYMOUS a déclaré agir en faveur des rebelles syriens tandis que SEA s’est vanté d’avoir piraté également les sites et canaux d’information de ANONYMOUS. Bien que ni l’un ni l’autre ne soit un acteur étatique, ils interviennent tous deux dans le conflit et la politique des états.

SEA a ouvertement revendiqué plusieurs cyberattaques. Etant donné que l’une des principales difficultés à réagir aux attentats est le problème de l’attribution, la transparence de SEA indique son besoin de signaler à la fois sa capacité et sa volonté. Sur la base de l’histoire de l’attaque, il semblerait que toute personne rejetant le régime d’Assad est une cible potentielle.

En conclusion, le cyber-conflit syrien nous montre que l’utilisation du cyberespace doit être considérée comme une partie intégrante de tout conflit contemporain et futur. Quelle qu’en soit la forme, ses effets se feront obligatoirement sentir dans le monde physique aussi.


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