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Etat des lieux et perspectives sur la destruction des documents après numérisation, quels critères prendre en considération ?

septembre 2016 par Hervé STREIFF, Responsable conformité et sécurité de l’information chez LOCARCHIVES

La destruction des documents originaux papier après leur numérisation n’est jusqu’à présent pas autorisée par la loi. Cette situation est en train de changer. Le point sur les dernières évolutions et leurs impacts en matière de gestion de documents. Jusqu’à récemment, dans le droit français, seul l’original d’un document a valeur probante. Rappelons qu’est considéré comme original le document nativement produit sur son support papier ou numérique. La copie numérique d’un document original papier ou l’impression papier d’un document original numérique ne constituent donc pas des preuves juridiques.

COPIE FIDELE, REGIME DE LA PREUVE ET DESTRUCTION DES ORIGINAUX

En cas de perte de l’original papier, la copie numérique peut toutefois avoir valeur probatoire, à deux conditions :

• qu’il s’agisse d’une copie fidèle produite via des procédés spécifiques de numérisation préservant la vocation probatoire du document

• qu’elle soit conservée dans un système d’archivage pérenne, c’est-à-dire un Système d’Archivage Electronique (SAE) à vocation probatoire tel que défini par la norme NFZ 42-013.

Dans tous les cas, la destruction de documents originaux n’était pas prévue par la loi. Cependant quelques exceptions permettent de déroger à la règle à condition de garantir la fidélité de la copie.

Par exemple, dans un vademecum consacré au sujet, le Service Interministériel des Archives de France (SIAF) mentionne la possibilité de détruire les originaux physiques, après constitution d’une copie fidèle. Cette destruction est soumise au préalable à un audit du Contrôle technique et scientifique de l’Etat. En définitive, cette autorisation revenait au même que de disposer d’une conformité NFZ 42-013, complétée d’une analyse de risque juridique liée à la destruction.

UNE LEGISLATION EN MOUVEMENT DANS CERTAINS PAYS EUROPEENS

Depuis 2016, on constate toutefois des initiatives nationales visant à faciliter la destruction massive de documents papier. Le Luxembourg et la Belgique ont légiféré pour permettre la destruction à grande échelle des originaux, sous réserve d’avoir procédé à une numérisation fiable et de recourir à des opérateurs de numérisation qualifiés.

Depuis peu, la France organise la destruction de factures (au sens fiscal), sous réserve d’avoir effectué une numérisation en couleur et d’avoir signé les documents numérisés.

De même, le droit des contrats dans le Code Civil a été récemment modifié par l’ordonnance n°2016-131 du 10 fe ?vrier 2016. Celle-ci stipule que « la copie fiable a la même force probante que l’original ». Même si sa fiabilité est laissée à l’appréciation du juge, « est réputée fiable la copie exécutoire ou authentique d’un écrit authentique. ». Toutefois, « si l’original subsiste, sa présentation peut toujours être exigée. »

UNE NOUVELLE NORME "NUMERISATION FIABLE" EN COURS D’HOMOLOGATION

L’AFNOR travaille actuellement à l’élaboration d’une définition normative de ce que doit être une « numérisation fiable » en complément de la norme NFZ 42-013. L’objectif est de créer une norme homologuée dédiée à la numérisation des documents d’activité courants sur laquelle pourra s’appuyer un dispositif de certification.

La norme NF Z 42-013 énonce un ensemble de spécifications de l’AFNOR concernant les mesures techniques et organisationnelles à mettre en œuvre pour l’enregistrement, le stockage et la restitution de documents électroniques, dans des conditions qui en garantissent l’intégrité.

Cette future norme intégrera des mécanismes « robustes » de numérisation, et notamment la production d’éléments de preuve qui permettent d’attester que la numérisation est fidèle à son original papier. Ces éléments seront reversés dans un SAE de telle manière à pouvoir démontrer qu’il n’y a pas eu de perte d’intégrité lors de l’opération de numérisation.

Concrètement, la norme exigera de la part de l’entreprise qui archive :

• une de ?monstration de la fide ?lite ?,

• une adaptation des modes colorime ?triques et de re ?solution,

• un calcul d’empreinte fourni en tant que me ?tadonne ?e,

• pour les documents les plus sensibles, la fourniture d’une attestation de nume ?risation par l’ope ?rateur de nume ?risation reprenant l’ensemble des e ?le ?ments de trac ?abilite ? du processus.
Elle sera soumise à enquête publique courant 2016.

UNE EVOLUTION PROCHAINE DE LA LEGISLATION A PREVOIR

Cette norme ouvre la voie à une législation statuant sur la possibilité de détruire des originaux papier. Le droit français pourra s’appuyer dessus pour autoriser la destruction de documents après leur numérisation. Les bénéfices attendus sont des gains de productivité importants et une modernisation de l’administration et de l’économie.

On peut donc prévoir que d’ici 2 ou 3 ans, il sera possible de détruire les documents originaux après qu’ils soient passés par une chaine de numérisation fiable.

CONCLUSION : DETRUIRE OUI, MAIS SUR QUELS CRITERES ?

Les entreprises doivent-elles pour autant prévoir de détruire l’ensemble de leurs originaux papier après les avoir scannés ? Si le droit va bientôt les autoriser à le faire, deux autres critères doivent être pris en compte : la rentabilité économique et l’analyse des risques.

D’une part, la conservation sur une longue durée de documents électroniques dans un SAE reste plus coûteuse que celle d’archives physiques. En effet, pour les documents peu consultés, l’économie sur les coûts de consultation est faible et peut être inférieure aux coûts de dématérialisation.

D’autre part, le papier reste un élément de continuité de l’activité. En cas d’incident sur la chaîne numérique, il peut être utile de pouvoir présenter l’original papier. Et réciproquement : si l’original papier vient à disparaître, sa copie numérique certifiée permettra de continuer à disposer d’une preuve. La conservation des deux originaux, papier et électronique, peut s’inscrire dans une stratégie de maîtrise des risques, notamment pour des documents très sensibles ou portant sur des affaires à fort enjeu économique.

Aussi, une destruction du papier n’est donc pas toujours souhaitable. Détruire, oui pourquoi pas, puisque le droit le permet (bientôt), mais cette stratégie doit faire l’objet d’une solide analyse associée à une évaluation des coûts intégrés sur toute la durée de conservation.


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