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Antoine Normand, CEO de BlueBear : "un partage des données au niveau international ferait avancer la lutte contre la pédopornographie"

novembre 2009 par Emmanuelle Lamandé

Créé par la société québecoise BlueBear, le logiciel LACE permet aux forces de l’ordre de classifier les images et vidéos à caractère pédopornographique, provenant de sources en ligne ou d’ordinateurs saisis dans le cadre d’enquêtes. Cet outil permet de réduire considérablement la part de traitement manuel de ces données et son impact psychologique sur les enquêteurs. Face à la commercialisation croissante du marché de la pédopornographie dans le monde, des moyens de lutte doivent également se développer. Un combat qui ne saurait malheureusement aboutir sans le déploiement des forces humaines nécessaires et un partage des données au niveau international.

Antoine Normand, CEO de BlueBear, et Eric Duflos, Attaché sectoriel, Délégation Générale du Québec

Global Security Mag : Pouvez-vous nous présenter BlueBear ?

Antoine Normand : BlueBear est une entreprise privée canadienne qui développe des solutions permettant de lutter contre l’exploitation des enfants. A l’aide des corps de police spécialisés dans les cybercrimes impliquant l’exploitation sexuelle des enfants, BlueBear a développé le logiciel LACE. Dédié aux forces de l’ordre, à la police et aux services judiciaires, ce logiciel permet la classification du contenu visuel d’ordinateurs saisis dans le cadre d’enquêtes de pédopornographie. Il permet aux enquêteurs de classifier de grandes quantités de données image, provenant de sources en ligne et d’ordinateurs saisis, réduisant ainsi le temps et les ressources nécessaires.

L’idée de créer ce logiciel est née des constats suivants. Tout d’abord, dans les pays du CommonWealth, les policiers ont l’obligation de consulter l’intégralité des images ou vidéos à caractère pédopornographique, sinon les preuves peuvent s’avérer irrecevables devant la cour et le crime resté impuni. En outre, la capacité des disques durs a considérablement augmenté pour des prix à la baisse. La capacité d’emmagasinement des criminels en est démultipliée. Les policiers se retrouvent donc avec des centaines de milliers d’images à visualiser.

GS Mag : Comment fonctionne votre technologie ?

Antoine Normand : LASE est basé sur une technologie de reconnaissance visuelle des images et des vidéos. A l’aide de l’analyse biométrique avancée, les visages qui se trouvent dans les images sont automatiquement extraits et compilés en vue de créer des listes de victimes et de suspects, ou de les comparer aux autres visages dans les banques de données image existantes. LACE reconnait le contenu de l’image plutôt que le fichier informatique. Ainsi, peu importe le format, le type de fichier,..., de l’image ou de la vidéo, si celle-ci a déjà été vue et catégorisée, cette décision sera répliquée indéfiniment par la suite. C’est le policier qui configure le logiciel et détermine ses catégories de classification. Le logiciel produira ensuite un rapport destiné à la Cour.

La classification de contenu pédopornographique est psychologiquement l’une des pires tâches à accomplir, ce logiciel permet au policier de voir l’image ou la vidéo une seule fois et de ne plus avoir à la revisualiser par la suite. En moyenne, LACE réduit de 85% à 95% le nombre d’images et de vidéos à être revus manuellement par un enquêteur. Plus la base de données est grande, plus le chiffre avoisine les 95%. Seules les images qui n’ont jamais été vues, les images inédites et méconnues des réseaux sont à traiter manuellement. Le travail de plusieurs mois auparavant s’en trouve réduit en quelques jours.

GS Mag : Quel état faites-vous du marché criminel de la pédopornographie aujourd’hui ?

Antoine Normand : On observe un phénomène croissant de bandes organisées et de commercialisation du crime. Avant, les pédophiles partageaient des photos. Aujourd’hui, ce sont de véritables groupes organisés auprès desquels il est possible de passer commande de contenus pédopornographiques. On assiste également au développement de cas, notamment dans les pays d’Europe de l’est, où les parents louent leurs enfants contre rémunération. Les groupes pédophiles sont de mieux en mieux organisés et utilisent des subterfuges, comme le chiffrement, pour ne pas être repérés. De plus, le développement d’Internet généralise et industrialise le phénomène.

GS Mag : Qu’en est-il de l’évolution des moyens de lutte contre cette criminalité ?

Antoine Normand : Depuis 2007, les policiers français font de la "cyberinfiltration". C’est déjà le cas au Québec depuis 3/4 ans. Cette technique porte ses fruits mais n’est pas encore pratiquée dans tous les pays, car elle s’inscrit dans une logique de lutte informatique offensive. Les nouvelles méthodes d’enquêtes accroîssent considérablement le nombre de cas à traiter, mais malheureusement les ressources humaines, elles, restent les mêmes.

GS Mag : Etes-vous déjà venu à Milipol ?

Antoine Normand : C’est la première fois. La Délégation Générale du Québec a fait un travail important en amont afin de prévoir des rendez-vous avec les clients et distributeurs.

GS Mag : Que représente pour vous le marché français ?

Antoine Normand : Le marché français est très important puisqu’il est le seul qui soit vraiment centralisé (police et gendarmerie nationale). Le fait que nous soyons québécois et que le logiciel soit disponible en français représente un facteur clé dans nos échanges. De plus, il existe une très forte collaboration entre la police et la gendarmerie du Québec et de la France.

GS Mag : Qu’est-ce qui fera, selon vous, avancer la lutte contre la pédopornographie ?

Antoine Normand : La clé se trouve dans le partage des données au niveau international. 3 500 organisations font ce travail dans le monde, mais seul le partage des données entre ces différents organismes fera la différence dans la lutte contre la pédopornographie. Plus la base de données pédopornographiques sera grande, plus le travail des enquêteurs sera facilité.


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